Risque de black-out : les Belges restent sereins
Il ressort de récentes enquêtes menées par ING qu’une grande majorité des Belges ne souhaite pas payer son électricité plus cher pour éviter le risque de black-out. La plupart d'entre eux ne s'inquiètent pas non plus de la sécurité nucléaire en Belgique.
ECONOMIC.POLL@ING
N° 35 - Bruxelles, 30 octobre 2014
Il ressort de récentes enquêtes menées par ING qu’une grande majorité des Belges ne souhaite pas payer son électricité plus cher pour éviter le risque de black-out. La plupart d'entre eux ne s'inquiètent pas non plus de la sécurité nucléaire en Belgique. Toutefois, ils estiment que notre pays devrait investir davantage dans d'autres énergies que le nucléaire pour ne pas connaître une situation de black-out.
Après la mise à l'arrêt cette année de trois des sept réacteurs nucléaires que compte la Belgique, la question de l'approvisionnement électrique s'est retrouvée au centre des débats. En effet, le risque de coupure de courant (ou "black-out") serait bel et bien réel cet hiver, lorsque la consommation électrique est la plus importante. En conséquence, le gouvernement a élaboré un plan de délestage scindant le pays en six zones qui, en cas de pénurie, devraient une à une se priver d'électricité pendant une période de trois heures au maximum.
Maintenant que l'hiver frappe à nos portes, Economic.Poll@ING est allé sonder l'opinion des Belges sur la problématique de l'approvisionnement électrique. Dans le cadre de cette enquête, les sondés ont été confrontés à un scénario hypothétique : seraient-ils prêts à payer leur électricité plus cher pour éviter le risque de black-out ? Une grande majorité des Belges (81 %) a répondu par la négative (graphique 1). Ainsi, un approvisionnement électrique permanent ne serait-il pas absolument indispensable à leurs yeux ? Probablement, parmi ces 81 % se trouvent aussi des personnes qui, par principe, refusent de payer leur électricité plus cher, même si elles ne peuvent pas s'en passer. En revanche, 10 % des personnes interrogées sont disposées à payer leur électricité plus cher car elles ne pourraient pas s'en passer. Vu l'émoi populaire suscité par la perspective d'un black-out, ce résultat se révèle relativement positif – même si ces chiffres ne concernent que les particuliers (pour les entreprises, ce taux devrait être nettement plus élevé).
La plupart des Belges n'envisageraient donc pas de mettre la main au portefeuille pour éviter le risque de pénurie. Est-ce à dire qu’une part non négligeable de leur consommation ne leur serait pas essentielle ? Ces familles pourraient alors réduire leur consommation afin que le pays ne se retrouve pas en situation de black-out cet hiver. C'est d'ailleurs dans cette optique que le gouvernement fédéral vient de lancer une nouvelle campagne incitant les foyers à consommer moins d'énergie pendant les pics.
Ce risque accru de black-out électrique s'explique par la fermeture inattendue de la centrale nucléaire de Doel 4 à la suite d'une perte d'huile, probablement causée par un sabotage. Les deux autres réacteurs que sont Doel 3 et Tihange 2 avaient déjà été mis à l'arrêt : tout d'abord parce que des défauts dus à l'hydrogène avaient été décelés dans les cuves des réacteurs (ce qui risquait d'entraîner l'apparition de micro-fissures), puis pour mesurer l'impact des radiations nucléaires sur les cuves. Malgré ces incidents, la moitié des Belges (52 %) ne semble toutefois pas préoccupés par la sécurité nucléaire (graphique 2). Cette question en inquiète seulement 26 % depuis longtemps et 22 % depuis l'apparition des fissures en 2012.
Soulignons que ces résultats correspondent parfaitement à ceux de l'Economic.Poll@ING d'août 2013, qui portait alors sur la sortie du nucléaire : 52 % y étaient opposés, contre 48 % d'opinions favorables. Des chiffres qui semblent confirmer l'importance que revêt la sécurité dans l'optique d'un abandon de l'énergie nucléaire.
La nouvelle campagne lancée par le gouvernement fédéral est une solution à court terme. Si l'on veut éviter tout risque de black-out à long terme, il va falloir adopter des mesures structurelles. Certes, la majorité des sondés ne s'inquiète pas de l'énergie nucléaire et n'est pas favorable à l'arrêt de son utilisation, mais cela ne signifie pas pour autant que les Belges souhaitent à tout prix poursuivre son exploitation. En effet, seuls 22 % d'entre eux préféreraient que la Belgique réinvestisse dans la production nucléaire (graphique 3) pour ne pas connaître une situation de black-out. Les Belges privilégient deux autres stratégies : près de la moitié d'entre eux (49 %) estime qu'il faut investir davantage dans d'autres énergies, tandis que 29 % s'expriment en faveur d'une réduction de la consommation d'électricité globale.
Une étude réalisée il y a peu (le 17 octobre 2014) par le Bureau fédéral du plan sur les prévisions énergétiques jusqu'en 2050 part du principe que notre pays mettra en œuvre ces deux dernières stratégies. En effet, cette étude considère la sortie du nucléaire prévue en 2025 comme donnée et prend les règles européennes en matière d'efficacité énergétique, d'émissions de CO2 et d'énergies renouvelables comme point de départ – sans cependant l’accord politique atteint la semaine passée sur la réduction des émissions de CO2 jusque 2030. Le Bureau du plan table sur une réduction de la consommation énergétique en Belgique au cours des dix prochaines années et sur une croissance spectaculaire des énergies renouvelables (graphique 4).
Seule ombre au tableau : les investissements nécessaires pour que ce scénario se réalise se traduiront par une hausse du coût de production de l'électricité et, par conséquent, une augmentation de son prix. Ceci s’est manifesté encore cette semaine avec les investissements en énergie solaire des dernières années en Flandre. Les gestionnaires du réseau de distribution et les fournisseurs d’électricité ont accumulé des dettes considérables en achetant les certificats verts des entreprises et des particuliers avec des panneaux solaires. Une partie de ces dépenses pourrait être récupérée chez les consommateurs dans les années à suivre, ce qui pourrait faire augmenter fortement la facture d’électricité.
En résumé, il est très vraisemblable que la pérennité de l'approvisionnement électrique provoquera inévitablement une hausse du prix de l'électricité – une situation à laquelle la majorité des Belges n'est pas encore préparée, à en croire l'Economic.Poll@ING.
(*) Economic.Poll@ING est une question posée chaque semaine aux clients d'ING sur la page logout d'ING Home'Bank. Les questions abordées ci-avant portaient sur les sujets suivants : sortie du nucléaire, entre le 12 et le 25 août 2013 (14.325 personnes interrogées) ; payer plus cher pour éviter tout risque de black-out, entre le 29 septembre et le 6 octobre 2014 (13.293 personnes interrogées) ; comment éviter tout risque de black-out, entre le 6 et le 13 octobre 2014 (10.288 personnes interrogées) ; inquiétude quant à la sécurité nucléaire, entre le 13 et le 20 octobre 2014 (10.778 personnes interrogées).
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