Grèce : un accord… pour trouver un accord

UPDATE 23.07.2015 - Après un marathon de négociations (14 heures d’Eurogroupe samedi, 17 heures de sommet dimanche), un accord est tombé ce lundi matin sur l’agenda des prochaines semaines. Chronologiquement cet accord tient en 3 points : (1) reconstruire la confiance entre la Grèce et ses partenaires, (2) négocier le troisième plan d’aide et (3) assurer la soutenabilité de la dette grecque.

Après un marathon de négociations (14 heures d’Eurogroupe samedi, 17 heures de sommet dimanche), un accord est tombé ce lundi matin sur l’agenda des prochaines semaines. Chronologiquement cet accord tient en 3 points : (1) reconstruire la confiance entre la Grèce et ses partenaires, (2) négocier le troisième plan d’aide et (3) assurer la soutenabilité de la dette grecque.

(1) Pour reconstruire la confiance, la Grèce doit prendre un certain nombre d’engagements : d’ici à ce mercredi quelques mesures phares doivent être ratifiées au Parlement grec en gage de bonne volonté (la réforme de la TVA discutée les dernières semaines, un cadre pour une réforme des pensions, l’indépendance de l’organe statistique officiel et la mise en place d’un Conseil Supérieur des Finances). La Grèce doit aussi s’engager formellement à améliorer ses propositions de réformes dans 4 domaines clés : les pensions, le marché du travail, la concurrence et le système bancaire.

Si ces gages de bonnes volontés sont acquis d’ici mercredi, un Eurogroupe (réunion des ministres des finances de la zone euro) téléphonique se tiendra mercredi soir pour demander aux Parlements nationaux qui le doivent de voter l’accord de ce dimanche au cours des sessions parlementaires de jeudi et vendredi prochains. A la fin de ce processus à haut risque, tant en Grèce qu’ailleurs en Europe, un dernier Eurogroupe devrait se tenir dimanche prochain pour donner un mandat de négociation à la « Troïka », désormais appelée les « institutions ».

(2) La négociation d’un troisième plan d’aide n’a donc pas encore commencé, et ce ne sera pas le cas avant lundi prochain. Cela risque d’être un processus assez long. Certains éléments clés du plan sont déjà connus comme des pré-requis : la modernisation de la fonction publique grecque, la compensation budgétaire des dépenses décidées depuis les élections de février (à l’exception notable des dépenses « humanitaires » d’aide sociale) et surtout la mise en place d’un fonds de privatisation. L’objectif de ce fond serait de gérer des actifs publics et de les vendre au meilleur prix (un processus qui prendra donc des années), ses recettes (estimée à 50 milliards d’euros sur plusieurs années) iront à 75% au remboursement de la dette grecque (pour rembourser le plan de recapitalisation des banques de 25 milliards qui est à venir, 12,5 milliards pour faire baisser le niveau de la dette) et 25% (les 12,5 milliards d’euros restant) en plan d’investissements pour la Grèce. L’idée est donc bien de lier les investissements aux efforts grecs. Le Conseil Européen a hier « pris note » du fait que l’estimation des besoins de la Grèce par les institutions étaient d’environ 82 à 86 milliards d’euros, soit les 50 milliards de besoins de financement entre octobre 2015 et décembre 2018 (décrits par le FMI dans son rapport de juin), 25 milliards pour recapitaliser les banques (dont 10 pourraient être débloqués rapidement) et 10 à 12 milliards d’euros de remboursements prévus d’ici octobre qui pourraient faire l’objet d’un déblocage anticipé. Ce dernier était discuté lundi soir à l’Eurogroupe mais il n’interviendra certainement pas avant la semaine prochaine.

(3) Ce n’est que quand ce plan aura été négocié, mis en place et évalué une première fois (pas avant six mois) que le chapitre sur l’allègement de la dette pourra être ouvert. Il ne s’agira pas d’une réduction de la dette, les Européens ont été très clairs là-dessus, mais bien d’un allègement des charges (des taux plus bas et des maturités encore plus longues). Cela dit, la Grèce ne doit rien rembourser en capital, ni même payer d’intérêt, sur la majeure partie de sa dette avant 2021, il sera donc difficile de faire plus dans six mois.

La feuille de route est donc semée d’embûches. Si le Parlement grec vote en effet quelques mesures symboliques et évite l’insurrection, les 7 Parlements nationaux concernés (Estonie, Lettonie, Finlande, Slovaquie, Allemagne, Autriche, France et possiblement Pays-Bas) parviendront-ils à valider le plan ? Et si les négociations commencent pour un troisième plan, aboutiront-elles ? Bien entendu, la « carotte » semble alléchante pour le Gouvernement grec : un plan d’aide de 35 milliards qui s’ajouteraient (ou incluraient, rien n’est encore clair) aux 12,5 milliards venus du plan de privatisation. Mais le contenu de ce plan s’étalera au moins sur cinq ans et ses sources de financement sont encore incertaines : tout juste la Commission a-t-telle promis un milliard pour cette année. Enfin, il reste la question du secteur bancaire : en effet, si on a parlé recapitalisation ce week-end, la discussion sur la position de liquidité des banques, le principal obstacle à leur potentielle réouverture, a été largement absente. Il est peu donc probable que les banques puissent rouvrir cette semaine, mais une décision de la BCE pourrait permettre une réouverture la semaine prochaine si le processus reste sur les rails jusqu’à dimanche. On voit de toutes façons mal les contrôles de capitaux (et les limites de retraits) s’arrêter totalement avant que la BCE n’ait fait un audit du secteur et qu’un plan de recapitalisation soit en place (ce n’est prévu que pour septembre).

Ainsi, si la sortie de la Grèce de la zone euro a été écartée par les chefs d’Etat ce week-end, exclure totalement cette possibilité serait sans doute aller un peu vite en besogne. En effet, les risques restent très élevés, le premier étant le risque politique en Grèce cette semaine, et nous sommes encore loin d’une solution qui garantisse la stabilité des remboursements grecs à l’avenir, et son maintien à terme dans la zone euro. Le Sommet de ce week-end aura en tous cas eu pour mérite de rappeler la nécessité, pour qu’une union monétaire reste viable, que tous les partenaires suivent les mêmes règles.


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Vanessa Zwaelens

Head of External Communication